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Le sport et la guerre XIXe -XXe siècles.

lundi 9 novembre 2009, par Comité d’organisation

Le programme retenu pour les 14e Carrefours d’histoire du sport, organisés à Rennes du 28 au 30 octobre 2010, porte sur l’histoire des relations entre le sport et la guerre aux XIXe et XXe siècles. Si plusieurs études se sont attachées ces dernières années à montrer de quelle manière l’activité physique a pu s’enraciner dans une forme de préparation guerrière, mettant notamment en lumière les origines militaires de l’éducation physique, peu de travaux ont entrepris d’élargir les horizons de la recherche afin d’éclairer les articulations multiples -culturelles, sociales, politiques, idéologiques- qui inscrivent sport et guerre dans des perspectives structurantes fondamentales pour les sociétés contemporaines. Le sport est-il, pour paraphraser Clausewitz, la guerre poursuivie par d’autres moyens ? Le sport est-il tout simplement lui-même « la guerre » comme certains auteurs contemporains l’ont souligné en stigmatisant les flambées de violence récurrentes dans les stades ? Est-il un moyen de faire la guerre comme le montre dans le conflit qui a miné les pays de l’ex Yougoslavie, le cas du chef de guerre Arkan, s’appuyant sur les groupes de supporters des équipes de football pour constituer ses propres troupes paramilitaires engagées dans le « nettoyage ethnique » ? La guerre n’est-elle que ce « grand match » décrit par la presse sportive en 14-18 et peut-il exister comme l’appréhendait Georges Hébert en 1918 des « sports de guerre » ? Par ailleurs, comment la guerre a-t-elle participé à freiner et/ou accélérer la diffusion et le développement du sport ? Comment a-t-elle infléchi les trajectoires des sportifs ? Comment et avec quelles conséquences le sport a-t-il investi l’espace des conflits ? Quels enjeux politiques, idéologiques, géo-culturels recouvre l’utilisation du sport et de ses champions dans les nouvelles formes d’affrontement qui surgissent au XXe siècle ? Quelles places occupent les Jeux Olympiques, le football, les grandes manifestations sportives et les institutions internationales qui les gèrent (CIO, FIFA, etc.) dans la régulation des tensions internationales et l’instauration d’un nouvel ordre mondial ?

Si le thème de l’inscription du sport dans la guerre et/ou de la guerre dans le sport apparaît comme un sujet de réflexion nouveau pour les historiens, l’ambition d’un tel colloque est de mettre en lumière ces relations comme un nouvel objet d’histoire. Placé sous l’égide du LAS-LARES (EA 2241), dont l’un des principaux axes de recherche s’intitule « Violence, sécurité, défense, déviance », le projet scientifique se veut le plus intégrateur possible. Le sport doit être appréhendé, dans des perspectives larges, comme l’ensemble des pratiques d’exercices corporels incluant à la fois les formes compétitives, les pratiques récréatives et de loisir, les jeux traditionnels, la gymnastique, la danse et l’éducation physique. La guerre devra être comprise à la fois comme conflit et comme ensemble de phénomènes et processus culturels, sociaux, politiques inscrits dans le déroulement historique de l’affrontement guerrier, de sa préparation, de ses conséquences humaines, culturelles, sociales, politiques, idéologiques, techniques, économiques, etc. Les limites chronologiques sont celles de la période contemporaine, XIXe-XXe siècles mais n’excluent pas les regards porté sur l’histoire des mondes très contemporains (XXIe siècle) ni, a contrario, les études consacrées plus classiquement aux périodes antiques, médiévales et modernes dans la mesure où les travaux proposés permettent de prolonger la réflexion dans les perspectives de la longue durée et/ou de l’histoire comparée.

Les communications qui pourront développer des études de cas comme des approches plus générales, s’inscriront dans les axes suivants :

1. Guerre et paix... Le sport comme mode de gouvernance internationale.

Dès la fin du premier conflit mondial, le sport prend une place importante dans la gestion des lendemains de guerre voire dans la régulation des conflits. La participation aux grandes compétitions internationales devient un enjeu stratégique soumis à conditions. Les vaincus de la Grande guerre comme l’Allemagne sont exclus de la scène sportive pendant que les vainqueurs célèbrent ensemble leur victoire au cour des Jeux interalliés. Plus généralement le sport devient une « arme » entre les mains de la « communauté internationale » naissante alors que le boycott permet aux nations de peser dans un sens ou un autre sur les tensions du monde. Comment le sport se superpose-t-il à la guerre ? Comment participe-t-il à générer de nouveaux modes de gouvernance internationale ? Avec quels résultats ? Le conflit latent entre les deux blocs Est et Ouest a largement participé à amplifier l’importance du sport dans les rapports de force internationaux et les enjeux géopolitiques. Au cours de la guerre froide, des années 1940 aux années 1980, la scène sportive est devenue le lieu d’affrontements plus feutrés par champions interposés. Ce phénomène pourra être approché sous divers angles : compétitions, champions, modèles idéologiques, propagande, systèmes politiques, boycotts, etc. Enfin, les communications s’intéresseront également à l’histoire du sport au service de la paix. Il s’agira en particulier d’éclairer le rôle des ONG dans l’organisation et la gestion des projets de paix à caractère sportif et/ou dans l’utilisation du sport à des fins de restauration des liens interculturels entre nations. Dans cette perspective, pourront également être examinés les rôles et missions du Conseil de l’Europe, de l’ONU, de l’UNESCO et d’un certain nombre d’institutions internationales comme le CIO, la FIFA, etc.

2. Le sport comme prolongement de la guerre / la guerre comme prolongement du sport.

Le sport constitue-t-il une figure euphémisée de la guerre ? Est-il la guerre poursuivie par d’autres moyens ? Constitue-t-il l’indice d’une forme de pacification des mœurs telle que l’envisageait N. Elias ou bien faut-il, comme le montre l’histoire très contemporaine, chercher aussi à comprendre comment le sport est susceptible de participer à la dynamique des guerres en offrant des structures, des formes d’organisation sociale, des méthodes, des discours et des valeurs susceptibles de constituer autant d’outils et de supports intégrés à la préparation ou au déroulement des affrontements ainsi qu’aux formes de propagandes attachées aux conflits ? Le sport représente également pour le pouvoir et pour tout groupe de pression un instrument de première importance. De quelle manière les Etats en guerre et/ou les groupes combattants (opposants, résistants, rebelles, terroristes, etc.) ont-ils pu mobiliser les ressources du sport pour servir aux formes d’expression, d’identité, d’affichage, de revendication, etc. On s’intéressera notamment ici aux modes d’instrumentalisation du sport dans, par, autour de la guerre dans des perspectives culturelles, politiques et idéologiques.

3. Le sport, le monde militaire et la guerre.

Si le thème des origines militaires de l’éducation physique a été traité, peu de travaux se sont intéressés au développement du sport dans les armées, qu’il s’agisse de formes ponctuelles, conjoncturelles, de rencontres sportives liées aux conflits ou plus généralement de la structuration et des formes d’institutionnalisation du « sport militaire ». Il s’agira ici de questionner les liens qui unissent le sport et l’armée dans les diverses armes (Terre, Marine, Air…), d’en étudier les pratiques, les structures, les orientations et, éventuellement, les liens avec le monde civil.

4. Le sport « dans » la guerre.

Les pratiques sportives investissent de nombreux temps et espaces du conflit. La guerre participe à l’acculturation sportive des combattants (brassages de population, camps de prisonniers…), elle est le lieu de circulation et d’appropriation de biens culturels, de diffusion de modèles. Qu’il s’agisse du front, de l’arrière, des activités pratiquées en captivité, des occasions de fraternisation. Sous quelles formes et avec quelles intensités se développent les pratiques sportives à la guerre ? Quelles représentations du sport émergent dans le creuset des conflits ? Les communications interrogeront également la transformation du mouvement sportif et de ses institutions dans la guerre. A titre d’exemple, pourront être examinées la position et les transformations du tissu associatif, des fédérations, des clubs, des patronages, des associations, des mouvements de jeunesse, etc.

5. Sportifs et sportives dans la guerre

Si le destin tragique de Jean Bouin, victime du premier conflit mondial, est bien connu, bien d’autres sportifs ont payé de leur vie leur engagement dans les affrontements des deux derniers siècles. D’autres encore en sont sortis blessés, mutilés ou simplement traumatisés. On s’intéressera ici au destin des sportifs dans la guerre, aux trajectoires de ces acteurs singuliers, à l’image et aux rôles des hommes et des femmes de sport dans la guerre. La question du genre, de la construction des masculinités et des féminités au sein du sport et de la guerre pourra constituer un angle d’approche particulièrement intéressant. Dans quelle mesure le sport constitue-t-il un espace de négociation des identités sexuées, de renforcement des stéréotypes et/ou au contraire de relative souplesse au cœur et/ou autour du conflit ? Comment la guerre et le sport dans la guerre participent-ils aux transformations et aux formes de ré-arrangements dans l’ordre du genre ?

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